Qu’il est beau de voir du théâtre vigoureux et ambitieux. C’est ce que la MC2 nous propose à travers trois pièces qui ont pour point commun de se concentrer sur les mots des femmes. Des femmes qui, pour être des victimes, n’en adoptent pas moins une attitude combative et inspirante. Présentation.
C’est parce que le théâtre peut encore être une tribune que la MC2 donne la parole aux femmes. Ces femmes-là sont des metteures en scène, des chorégraphes, des comédiennes qui ont confiance dans la vitalité de leur langage artistique. Aussi leur parole est-elle chargée d’une force salvatrice. Les trois pièces La Nuit se lève, Extra life et Black Lights, dressent des constats souvent désolants sur la manière dont la parole des femmes reste entravée aujourd’hui encore. Mais dans les trois cas, on ne reste pas les bras ballants face à cet état de choses. On agit, on se soulève, on montre la voie. On donne de la voix. Voilà un théâtre qui fait du bien. Alors on se lève et on applaudit.
La Nuit se lève, une écriture lumineuse
Il est question d’abus subis par des femmes. Le thème est sombre bien sûr. Mais il est si bien traité, à grand renfort de tendresse, d’humour et de délicatesse, qu’on en sort rassénéré. La metteure en scène Mélissa Zehner le revendique : « J’[ai] abord[é] cette thématique sombre et complexe à travers une forme artistique qui [met] en avant des personnages, des histoires incarnées, et qui [adopte] un ton personnel et lumineux. » C’est ainsi que cinq femmes, aux histoires et milieux sociaux différents, se racontent et se soutiennent. Grâce à une écriture kaléidoscopique habile, on sort avec ces femmes des méandres de la mémoire traumatique. Vivifiant.
Extra life, une expérience théâtrale intense
On est heureuses de voir sur scène « celle qui s’est levée et qui s’est cassée », pour reprendre les mots de Virginie Despentes pour qualifier Adèle Haenel après les César 2020. Pas étonnant que la comédienne, qu’on adore, collabore avec une metteure en scène et chorégraphe de la trempe de Gisèle Vienne. Son credo ? Utiliser toutes les facettes du langage scénique pour rendre perceptible les différentes interprétations d’un même moment. D’où ce titre énigmatique. « Extra life », c’est la volonté de montrer un moment « déplié », comme perçu à travers différents regards et différentes temporalités. « La pièce déplie un moment particulièrement important pour [un] frère et sa sœur, une fin de nuit, quelques heures, où une ouverture sensible nouvelle, commune aux deux personnages, va leur permettre de se rencontrer. », résume Gisèle Vienne.
Black Lights
La pièce chorégraphiée Black Lights s’inspire de l’excellente série H24, diffusée sur Arte. Cette dernière comporte 24 films courts réalisés à partir des textes de 24 autrices européennes. Chaque film décrit une situation de violence subie par une femme. Mathilde Monnier reprend dix de ces textes et leur adjoint la puissance du corps qui danse. Toute la palette des émotions irradie des mots prononcés et des gestes dansés : consternation, désolation, dérision, enthousiasme et humour. La complémentarité des langages artistiques permet le déploiement d’une énergie exceptionnelle. Le public lui-même se sent investit d’une vigueur toute neuve. Il ne fait pas que regarder. Il est interpellé. La passivité n’est plus de mise.
Les trois spectacles sont à retrouver à la MC2 :
La Parole des Femmes se Libère
La nuit se lève, du 31 janvier au 2 février à 20h
Extra life, le 31 janvier et le 1er février à 20h
Black Lights, le 7 et 8 février à 20h
MC2 : Maison de la Culture de Grenoble
4, rue Paul Claudel, Grenoble
Billetterie sur le site de la MC2
© Nicolas Eychenne
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